
Philippine Pereira Lopez
- Gant d’Or Houilles -
Boxe française
Philippine
Le Femina Sport est le premier club de football féminin français. Créé en 1912 il n’a été intégré à la Fédération française de football qu’en 1970. Dans la cour de récréation, les générations X et Y ont bien connu ce phénomène : saut à l’élastique pour les filles et football pour les garçons. On pouvait se mélanger pour un cache-cache mais guère plus. Revanche ! Les licenciées féminines sont de plus en plus nombreuses aujourd’hui. La Fédération française de football en compte 220 352 en 2023. Pour autant les stéréotypes de genre et réflexions sexistes font toujours écho dans les stades ou les vestiaires. Pas de jaloux, il y en a pour tous les goûts. Les autres sports ne sont pas épargnés. Philippine, Mélanie et Lola sont trois jeunes femmes qui pratiquent le sport à haut niveau. Nous les avons interrogées sur leur activité et leurs performances… sportives ! Chaque fois, la question du genre a été évoquée. Beaucoup moins chez Lola qui est la plus jeune des trois. Un espoir pour le sport, pour les prochaines générations et pour l’équité !
Elle est licenciée d’architecture du patrimoine, passionnée de vitraux et d’artisanat d’art. Elle est extravertie et féminine. Elle est championne de France de boxe française, championne d'Europe et championne du monde. Elle est surtout ultra déterminée à assumer cette dualité. Celle d’une femme qui, comme beaucoup, a plusieurs facettes. Phlippine n’a pas toujours eu cette assurance. Ses premiers pas sur le ring elle les fait à l'âge de 18 ans, sur les conseils de son père, lui-même champion de kung-fu lorsqu’il était jeune adulte. La jeune femme explique qu’elle était mal dans sa peau et reconnait avoir eu, au sortir de l’adolescence, des comportements turbulents, nerveux voire un peu agressifs. Ce mal-être a également déclenché une prise de poids et une relation au corps peu sereine. “ Va sur le ring ça va te détendre ! ” Ce n’est pas tout à fait la formule que son père a employée mais c’était en tout cas le sens de son propos ! Elle rencontre Sandrine et Stéphane, les coachs qui, comme son père, la suivent depuis lors. “Quand j’ai commencé le sport j’avais 40 kg de plus et les débuts n’ont pas été faciles. Les choses se sont mises en place doucement et je ne savais pas que j’allais atteindre ce niveau. En revanche je savais que j’avais besoin de cette pratique.”
“J’étais mal dans ma peau et un peu agressive, il fallait que je me canalise.”
En 2018 Philippine décide de faire une reconversion pour se consacrer pleinement à la boxe. Elle devient alors vice-championne de France et prépare le championnat du monde. Mais en août 2021, un accident de moto la cloue au lit pendant 2 mois. Si vous lui demandez si la boxe est un sport de garçon elle répond simplement que “C’est une discipline avant toute chose, c’est de la technique, de la rigueur, toutes ces choses qui sont accessibles pour les femmes comme pour les hommes.” Elle le prouve au sortir de sa convalescence lorsqu'elle remporte presque immédiatement le Championnat du monde en 2022 !
Son genre, ce sont les autres qui lui rappellent. On lui demande par exemple si elle n’a pas peur d'abîmer son visage “comme si les hommes, eux, ne le craignaient pas ?!” dira-t-elle.
“Quand tu es une femme et que tu boxes, tu deviens une esthétique, un physique. Ta féminité te discrédite
parfois auprès des autres. Cela a été le cas lorsqu’il m’est arrivé d’entraîner des hommes plus âgés que moi par exemple. On me disait être surpris en me voyant et ne pas m’imaginer “comme ça” (féminine) ! J’ai souvent dû rééquilibrer les rapports de “coach” à “coaché”. En général, quand je dis que je suis championne du monde ce rapport s’impose de fait.”
Elle dit composer avec ces pensées machistes mais reste toujours aussi surprise des avis que les autres lui partagent sur sa propre féminité. “Je ne demande l’avis de personne mais ma féminité fait souvent parler. On me trouve trop sexy et cela m’a contrainte à m’interroger sur l’image que je véhicule sur Instagram.” Ces questions n’étaient pourtant pas les siennes ! Philippine a craint, un temps, que cela entrave ses ambitions professionnelles.
Longtemps en conflit avec ce corps, elle affirme désormais que la boxe lui a permis d’assumer son identité et de disposer de cette confiance dont elle manquait. “J’ai accepté ce que je suis. La boxe m ‘a permis de m’épanouir en tant que femme, de prendre de l’assurance.”
